Certaines
dunes peuvent émettre spontanément un son grave harmonieux et puissant.
Ce phénomène provient d'un couplage entre le mouvement des grains de sable
dans une avalanche et certaines propriétés acoustiques remarquables du
sable..
Duna Bianca
De
nombreuses dunes éoliennes émettent un son puissant et harmonieux
lorsqu’une avalanche coule sur sa face pentue. Les avalanches se
forment lorsque l’angle de la surface dépasse une valeur
seuil appelée angle statique (entre 32 et 35 degrés pour
le sable). L’écoulement s’arrête lorsque la pente
relaxe en dessous d’un second angle appelé angle dynamique
ou angle de repos (entre 30 et 32 degrés pour le sable). La première
référence au phénomène date du XIXème
siècle, dans un manuscrit chinois. Dans le récit de ses
voyages parus en 1298, Marco Polo en livre une évocation exotique
et mystique ; le son y est décrit comme un mélange du son
de tous les instruments de musique, et en particulier le tambour.
La plupart
des dunes ne chantent que lorsqu’elles présentent, à
leur surface, une couche de sable très sec suffisamment épaisse.
Les petites dunes étant plus efficacement refroidies par le vent
et ne présentant pas de grandes faces d’avalanche, elles
chantent plus rarement (quelques jours par an pour les quelques 10000
dunes barkhanes du Sahara Atlantique). Lorsque le vent est suffisamment
fort pour accumuler efficacement le sable en haut des faces d’avalanche,
les plus grandes dunes peuvent produire des avalanches chantantes plusieurs
dizaines de fois par jour.
sable d'une dune qui chante
Le son n’est
pas relié au vent autour de la dune ni à une résonance
en son sein, mais au mouvement des grains en écoulement. En particulier,
le même son est émis par des avalanches nucléées
naturellement et par des avalanches induites par la poussée continue
d’une personne glissant le long de la face pentue.
Son entendu par
une personne glissant sur la dune
(http://www.pmmh.espci.fr/fr/morphodynamique/index.html)
Lorsque l’écoulement
de sable est entraîné par la gravité de manière
homogène et stationnaire, le son présente une fréquence
bien définie qui ne dépend que de la taille des grains,
et pas de la taille de la dune ni de la position de l’avalanche
sur la dune. Sur Terre, elle peut varier entre 60 Hz pour les plus gros
grains (350 microns) à 100 Hz pour les plus petites (100 microns).
Le phénomène peut-être reproduit à petite échelle
en induisant des écoulements entraînés non plus par
la gravité mais par un gradient de pression. Une poussée
de la main dans le sable induit par exemple une fréquence d’émission
qui croît avec la vitesse de poussée et peut atteindre 300Hz.
Dans tous les cas, les modèles simples d’écoulements
de grains conduisent à penser que la fréquence d’émission
est égale à la fréquence de collision des grains
dans la zone de cisaillement qui sépare l’avalanche de la
partie statique de la dune.
Relation entre fréquence
d'émission et taille de grain
L’émission
du son dans l’air est due à des ondes sismiques guidées
à la surface du sable dans l’avalanche mais aussi en dehors
de celle-ci, dans la zone de sable au repos. Ces ondes se propagent à
une vitesse extrêmement faible (autour de 50 m/s à 100 Hz),
qui provient en partie de la géométrie des contacts entre
grains. Comme la membrane d’un haut-parleur, l’oscillation
de la surface du sable liée à ces ondes émet une
onde acoustique dans l’air. Ces ondes sont excitées par les
collisions des grains dans l’avalanche. En retour, les oscillations
du sable tendent à synchroniser les collisions des grains qui de
ce fait, renforcent ces ondes. L’amplitude du phénomène
(100 à 105 dB) est limitée par le fait que les grains décollent
lorsque la gravité n’est plus capable de compenser l’accélération
du sol.
Ce mécanisme
est celui d’une émission stimulée, ce qui ferait du
chant des dunes, un Laser mécanique.
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