Lundi 14 Novembre 2005

Impressions colorées

par Françoise Viénot et Yves Charnay

CRCDG - Muséum National d'Histoire Naturelle
Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs

La couleur résulte d’un jeu entre la lumière et l’observateur.
Alors que la lumière est caractérisée par son spectre, et que les matériaux de notre environnement absorbent ou diffusent tout ou partie de cette lumière, notre système visuel crée la couleur de l’image.
Les photons qui frappent les cônes de la rétine sont absorbés par trois familles de pigments visuels aux sensibilités décalées sur l’échelle des longueurs d’onde. De ce fait, toute la richesse du spectre visible se trouve réduite à trois composantes. Cet appauvrissement de l’information spectrale présente un double intérêt. Il laisse intacte notre vision des détails. Il permet de synthétiser matériellement les couleurs avec un nombre limité de couleurs primaires : rouge, vert, bleu, pour un moniteur de télévision, cyan, magenta, jaune, pour l’imprimerie.
On estime à un ou deux millions le nombre de couleurs discernables. C’est le câblage des neurones rétiniens qui permet à partir d’une information spectrale très sommaire, comme nous l’avons expliqué, de discerner toutes ces couleurs. Car la rétine ne se réduit pas à une couche de cellules photosensibles. Celles-ci sont connectées à plusieurs réseaux de neurones, et connectées entre elles, de sorte que se dégage l’information sur les variations de couleur et les contrastes, fins ou dégradés, là où se passe quelque chose d’important dans la scène visuelle.

Et si toutes ces couleurs n’étaient que recréées dans notre tête ? L’expérience des ombres colorées montre que le même spectre lumineux peut générer des sensations de couleur très différentes selon le contexte qui se présente. Le fait que les ombres colorées puissent être photographiées ne contredit en rien l’origine corticale de la couleur des ombres. Etant donné une distribution spectrale de la lumière en un point de la scène visuelle, c’est l’organisation spatiale des stimulations au voisinage de ce point, qui au final, détermine la couleur perçue.

Yves Charnay

"Les couleurs de l'esprit"
Parlement de Saxe-Anhalt - Magdebourg - Allemagne
Septembre 2003

Enfin, la vision en couleur est tellement plastique que l’on se demande toujours si chacun perçoit les mêmes couleurs. La question reste ouverte. Dès lors que l’organisme est doté de plusieurs familles de récepteurs aux sensibilités spectrales différentes et d’un système neuronal construisant une information d’origine spectrale superposée aux objets du panorama, il y a vision en couleur. En témoigne la vision des daltoniens, dont la rétine ne contient que deux pigments visuels, mais qui voient, de manière particulière, en couleur, et en nuances.

Yves Charnay

" Lumières " Centre des Arts - Enghien-les-Bains - Septembre 2002