Depuis bientôt
5000 ans qu'elles furent édifiées, le mode de construction
des pyramides d'Egypte demeure, aujourd'hui encore, une véritable
énigme, que les technologies contemporaines sont incapables de résoudre.
Vue aérienne des trois grandes pyramides sur le plateau de Gizeh
:
Chéops, Khéphren et Mykérinos (droite à gauche)
Ce domaine est encombré de nombreuses « théories »
: machinistes, rampistes et mixtes - pour ne garder que les plus connues
- qui se contredisent ; aucune ne pouvant satisfaire pleinement à
la compréhension. Les théories mixtes (synthèse des
rampistes et machinistes), faciles à comprendre, semblent, aujourd’hui,
les plus admissibles bien que n’étant pas très convaincantes,
mais que l’égyptologie perpétue néanmoins,
faute de mieux. Aucune d’entre elles n'offre une approche véritablement
rationnelle, pas plus qu'un quelconque élément de preuve
tangible.
Or, la réponse à cette énigme ne peut pas plus être
fournie par l’égyptologie ; l’égyptologie, en
effet, principalement orientée vers la littérature, l’histoire,
l’épigraphie et l’archéologie (particulièrement
en France, dû à l’héritage de Champollion) n’a,
certes pas, pour vocation première d’expliquer la construction
des pyramides quoique certains égyptologues parmi les plus grands
s’y soient attachés. Elle en demeure toujours étrangère,
car ce domaine réclame des compétences «techniques
» en matière de construction d’ouvrages qui relèvent
de l’art de bâtir, enrichies des connaissances de l’histoire
et de la pratique de l’architecture et de l’ingénierie
ainsi que des modes opératoires des Savoir-faire traditionnels
des Métiers de la pierre.
A cet égard, l’approche et la démarche instaurées
ici, vont dans ce sens : en prenant le recul nécessaire, le sujet
peut être rationalisé en proposant une recherche de fond
sur les méthodes de construction des pyramides et leur évolution,
guidé par la logique logistique de la pratique de la mise en œuvre
: état de la question, analyse critique des différentes
« théories », détermination des principes fondamentaux
de l’Art de bâtir, énoncé d’hypothèses
ou postulats, recours à l’outil scientifique de la modélisation,
développements parallèles et/ou connexes, et vérifications
objectives par une équipe élargie.
« Le génie des pyramides » (thèse de doctorat
en Génie Civil), offre « un regard neuf et décapant
» et, « une démonstration faite sur la pyramide de
Kheops particulièrement brillante – un système ingénieux
et convainquant – un apport majeur à l’étude
des plus anciennes constructions monumentales en pierre ».
Il développe une vision généraliste et pragmatique
du constructeur praticien expérimenté, selon une démarche
rationnelle : scientifique, technique et opératoire qui impose
sa prise en considération par la communauté scientifique
et constitue un apport extérieur essentiel à l’égyptologie.
Elle se fonde sur 3 principes universels de l’Art de bâtir
:
- principe du vernaculaire : les ouvrages d’architecture –
et surtout les ouvrages tumulaires du génie civil – sont
réalisés avec les matériaux disponibles sur place,
seules quelques pièces spéciales proviennent d’ailleurs,
- principe d’évolution : les pyramides d’Egypte se
situent dans une continuité évolutive des méthode,
des savoir-faire et des outils technologiques, portée par la tradition,
qu’il faut aller reconnaître,
- principe d’économie : l’intelligence du travail humain
est régie par la règle d’économie d’effort
et de moyen, vision logique logistique – nécessaire et suffisante
- de celui qui réalise par lui-même (et non-pas celui qui
observe).
Trois aspects sont particulièrement novateurs :
1. Mise en évidence d’un « système constructif
» :
La modélisation du mode de construction de la Grande Pyramide
décrit par Hérodote , met en évidence un «
système de gradins successifs », basé sur un simple
mouvement élévatoire récurrent (correspondant à
un algorithme) : élever et poser un bloc (crossai) sur deux autres
(bomides), à l’aide d’une « machine faite de
courtes pièces de bois » : levier sur un trépied,
générant « un créneau formant escalier »
(dixit Hérodote).
Extraits de la simulation informatique du mode de construction «
machiniste » par « accroissement pyramidal »
La pyramide se construit par « accroissement pyramidal »,
bloc par bloc, face par face, par enveloppes successives « en pelures
d’oignons » ; les couloirs et chambres sont induits par le
système.
Celui-ci permet de construire, par anticipation sur une face, à
ciel ouvert, un faisceau de rampes (angle 50% induit par l’algorithme)
sur lequel seront glissés et mis en place les 52 monolithes de
granite de la chambre du Roi – de 30 à 60 tonnes situés
entre 45 à 65 m de hauteur -; la Grande Galerie apparaît
alors dans un rôle utilitaire : espace de manœuvre du contre-poids
– constitué des futurs blocs tampons – d’un «
ascenseur oblique » réalisé à cet effet.
Schéma de fonctionnement « utilitaire » de la Grande
Galerie de la pyramide de Khéops
En résumé :
Le texte d’Hérodote, demeuré hermétique jusqu’alors,
est ainsi explicité et corroboré ; le procédé
de construction des Grandes Pyramides est un « système constructif
» de type « machiniste », à l’opposé
des théories « rampistes » et « mixtes »
prônées par la plupart les égyptologues aujourd’hui.
2. Emprunt « alentour » des matériaux fournis par
le site :
Les blocs cyclopéens : calcaire nummulitique Lutétien,
empruntés « alentour » au plateau, de hauteurs variées
(selon les bancs - strates), nécessiteront un « appareillage
horizontal à décrochement » (économie en travail
et matériaux) ; la géologie du plateau de Gizeh indique
– par ses failles - un pli anticlinal orienté NE –
SO (en Nord 45°) faisant affleurer ce gisement particulier Lutétien,
qualifié de « pierre à bâtir »; le réseau
de fracturation naturelle des diaclases diagonales , permettant l’exploitation
plus ou moins directe des bancs - strates (blocs unitaires) en carrière
horizontale, serait orienté N-S et E-O.
Schéma de simulation de l’implantation et orientation des
pyramides par rapport au réseau théorique de fracturation du plateau de Gizeh.
Les pyramides seront donc implantées
sur le sommet et parallèlement à l’axe du pli (N 45°)et
orientées - diagonalement - sur la fracturation la plus fine (donc
N-S et E-O) qui pré-découpe, en partie, les blocs .
En résumé :
Les pierres de construction du gros-œuvre (98% du volume) sont empruntées
au site ; l’implantation et l’orientation des 3 Grandes Pyramides
de Gizeh seraient dues à la géologie : stratigraphie - tectonique
et à la fracturation naturelle des roches induite et non pas à
l’astronomie comme le laisse entendre nombre d’égyptologues.
3. Reconnaissance d’une
« évolution » technique :
D’une façon générale,
pour l’ensemble des Ouvrages tumulaires, les matériaux constitutifs
sont empruntés « alentour » aux sites d’implantation
; seuls certains monolithes et le revêtement éventuel seront,
par nécessité technique et/ou esthétique, d’une
autre provenance.
Ouvrages Tumulaires : aire de battage, dolmen et cairn, etc., ils sont
constitués des matériaux empruntés au site
L'analyse des caractéristiques
géologiques des sites d'implantation permet d'ordonner et d'expliciter
l'évolution des procédés de leur construction qui
participent d'un "continuum technique" de l'Art de Bâtir.
L’étude des ouvrages préhistoriques : cairns, dolmens,
tumulus, oppidums, etc., nous renseigne sur l’évolution de
la méthode « d’accrétion-exhaussement »
employée dans les pyramides à degrés d’Égypte.
La Pyramide à degrés de Djoser à Saqqarah est constituée
des murs accolés par « accrétion-exhaussement
Ce mode « générique
» de la construction par degrés : méthode «
d’accrétion-exhaussement » est mis en évidence
par l’examen des ouvrages mineurs du Génie rural, issu du
Vernaculaire (épierrements).
La méthode « d’accroissement
pyramidal » des grandes pyramides correspond à une avancée
technologique et intellectuelle : l’invention de la « machine
» capable de manœuvrer des blocs cyclopéens de 2,5 tonnes
et du « système constructif» (algorithmique) qu‘elle
génère.
En résumé :
La forme des différentes pyramides : à degrés, lisses
ou à texte, est générée par le « le
système constructif » utilisé, lui-même induit
par les caractéristiques dimensionnelles de matériaux fournis
par le site. Le choix du site est alors fonction de la présence
de matériaux utilisables par rapport à l’outillage
à disposition ; les Grandes Pyramides constitueront une avancée
technologique par l’invention de la « machine » capable
d’élever les blocs de 2,5 tonnes, d’un gradin sur l’autre.
Conclusion :
Les pyramides d’Égypte se construisent à partir du
centre de la base, par « accrétion exhaussement » (pyramides
à degrés) puis « accroissement pyramidal » volumique
(grandes pyramides) et doivent être comprises dans le « continuum
technique » des Ouvrages tumulaires et de l’Art de bâtir.
Pyramides à degrés : tableau comparatif des solutions proposées
La compréhension du
mode de construction n’est pas du domaine de la « géométrie
» des formes élémentaires (vision externe des observateurs
- Grecs Ioniens) mais de celui de la « logistique ou algorisme »
cumulatif, véritable « pratique-pensée œuvrière
» archaïque qui les génère (vision interne des
constructeurs - Égyptiens et Sumériens).
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