Lundi 13 Octobre 2003

Le verre, un matèriau fragile ?

par Hervé Arribart & René Gy

Société Saint Gobain

 

Certains mots possèdent, suivant qu'ils soient employés dans le langage scientifique ou dans le langage courant, des sens différents. L'adjectif fragile est de ceux-là. Dans le langage courant, il qualifie un objet de faible résistance mécanique, qui résiste mal à des sollicitations mécaniques (impact, compression, tension, ...), même faibles. Mais, chez les mécaniciens des solides, sont qualifiés de fragiles les matériaux dont la rupture se fait d'une façon bien précise : l'objet cède brusquement sous une certaine contrainte, " sans prévenir " (ils s'opposent en cela aux matériaux ductiles, comme les métaux, qui se déforment beaucoup avant de finir par céder). Mais cette définition ne préjuge pas de l'intensité de la contrainte qu'il faut appliquer pour que la rupture se produise. On peut donc imaginer un objet fait d'un matériau fragile qui soit très résistant mécaniquement.

D'ailleurs, il en existe : les fibres optiques, tout comme les fibres de verre qui sont utilisées pour le renforcement des polymères (pour faire des matériaux composites), présentent une très bonne résistance mécanique, qui est d'environ 5000 MPa (5 109 Pascal). Une telle fibre, d'un diamètre de 0,1 mm, soit environ le diamètre d'un cheveu, peut supporter sans céder une masse de 5 kg. C'est mieux qu'une fibre d'acier de même diamètre !

Fibres de verre

Pourtant, deux verres à boire qui s'entrechoquent peuvent se briser, alors que la contrainte à laquelle ils sont soumis ne dépasse guère 10 MPa.

Il n'y a rien de contradictoire entre ces deux faits : la caractéristique d'un matériau fragile est justement que l'intensité de la contrainte mécanique qui provoque la rupture de l'objet dont il est fait n'est pas une caractéristique intrinsèque du matériau. Elle dépend beaucoup de la présence éventuelle de défauts, ainsi que des contraintes internes qui ont pu y être accumulées. Ces deux paramètres dépendent eux-mêmes de l'histoire de l'objet considéré : de la façon dont il a été élaboré et manipulé et des cycles thermiques auxquels il a pu être soumis.

Des objets seront présentés, faits du même verre, dont certains sont très fragiles - dans le sens commun du terme - et d'autres très résistants.

Larme batavique en lumière polarisèe

Une autre expérience sera réalisée consistant à préparer des objets étonnants, à la fois très fragiles, puisqu'il suffit d'une pichenette pour les pulvériser, et très résistants, puisqu'on peut taper dessus avec un marteau sans qu'ils se brisent.

Il s'agit des "larmes bataviques", ainsi nommées car les premières venaient de Flandres, et que les anglais appellent larmes du prince Rupert - du nom du neveu du roi Charles I - qui les a introduites en Angleterre pour qu'elles soient examinées par la Royal Society en 1660.

Larme prince Ruppert

 Larmes bataviques (René Gy et Jean-Benoît Racaud)
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 Visualisation des contraintes à d'un polariscope (René Gy)
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